Théâtre itinérant, c’est par un atelier sur le costume donné dans une école professionnelle que les Nouveaux Disparus enfilent un habit qui se brodera au fur et à mesure d’économie sociale, une avancée dont se souvient Jamal, directeur artistique de la structure : « A l’occasion d’une collaboration avec un établissement scolaire pour un festival, nous avons pu constater à quel point le métier de costumière valorisait ces adolescentes qui faisaient l’objet de peu de reconnaissance dans leur vie de tous les jours. Nous avons alors réinterrogé notre mission – mettre la culture, dans sa diversité, à disposition des gens qui n’y ont en général pas accès, pour des raisons économiques et sociales – pour y greffer un volet ‘emploi’ permettant d’avancer encore dans cette direction intégrative des publics les plus précarisés ». Et la compagnie de s’ouvrir en toute logique aux métiers techniques : monteur, régisseur, machiniste… autant d’opportunités pour celles et ceux qui peuvent prendre le rythme de la caravane et y faire preuve d’initiative et de rigueur. « Nous avons également ouvert le spectre à des fonctions de secrétariat, formateur, etc. pour avoir cette approche dans tous les pans du projet ». Partenaire des régies mobiles, des missions locales et des communes (à Bruxelles et en Wallonie), l’entreprise culturelle est d’ailleurs reconnue depuis quelques années comme Initiative Locale de Développement de l’Emploi par la Région bruxelloise.
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Si l’insertion est une des raisons d’être des Nouveaux Disparus, ceux-ci sont avant tout organisateurs d’événements. « Nous créons pas mal d’happenings sur tout le territoire de la Fédération Wallonie-Bruxelles, et sommes l’initiateur du festival ‘Théâtre Nomade’ (ndlr : dont l’édition 2020 est malheureusement annulée), un rendez-vous incontournable dans le paysage bruxellois des arts de la rue. Le festival ‘Mimouna’ est notre autre grand projet récurrent, et est consacré quant à lui au théâtre-atelier. Il permet à des jeunes de s’exprimer au travers de l’outil théâtral, et se construit avec le tissu associatif des quartiers. Il donne lieu à un spectacle final, résultat de plusieurs semaines de travail ». La Compagnie des Nouveaux Disparus est aussi une troupe, qui crée jusqu’à une pièce par an et la tourne plusieurs mois durant.
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« Nous creusons une thématique sociétale et la diffusons dans les communes défavorisées, les zones de logements sociaux, etc. dans une optique de participation citoyenne. L’arrivée du chapiteau est toujours le synonyme de la mobilisation des associations du territoire et enclenche une dynamique qui se veut riche en échanges, dans l’espace public. Nous aimons à rappeler que le théâtre était au départ une forme populaire, avant de devenir un divertissement pseudo-bourgeois ». Les nouveaux disparus, ou ces masses oubliées.
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Montée de l’extrémisme, ou conditions de vie des populations Roms : autant de sujets développés ces dernières années par la Cie et qui sont réappropriés par les associations de terrain (maisons de jeunes, centres culturels, AMO, régies de quartier). « Notre objectif est d’amorcer le dialogue et de permettre aux acteurs locaux de le poursuivre. Nous allons parfois jusqu’à monter un projet partenarial global pour qu’une petite structure qui nous sollicite puisse avoir accès à l’objet de médiation que nous mettons en place ». Impliquer tout un quartier, telle est la volonté des Nouveaux Disparus qui tirent bien souvent un triste constat : celui de l’abandon. « Cela dépend évidemment des politiques en place et nous ne pouvons pas généraliser, mais notre position d’observateur nous amène à nous poser beaucoup de questions sur les non-choix qui sont faits dans certaines villes quant à certaines franges de la population ».
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De la crise sociale à la crise sanitaire qui aggravera en retour la première, il n’y a qu’un pas, que les Nouveaux Disparus ont bien entendu franchi non sans mal, comme l’ensemble du secteur culturel. « La Fédération Wallonie-Bruxelles va nous permettre d’amortir partiellement le choc (ndlr : la compagnie est indemnisée à hauteur de 48.500€ par le Fonds d’urgence culture de la FWB) mais ce sont surtout des mois de préparation qui tombent à l’eau ». Alors, l’équipe d’insertion se mobilise pour faire la maintenance technique, en attendant des jours meilleurs. « Nous sommes également en réflexion sur la mise en place d’un pôle économique et solidaire en notre camp de base de Saint-Josse. Nous sommes privés de spectacles mais avons d’autres compétences en interne. En tant qu’acteur socioculturel, nous pouvons répondre de diverses manières à la demande du citoyen… alors, pourquoi pas apprendre à reconfectionner des meubles, par exemple ».
La Cie prépare 2021 en s’adaptant aux circonstances, réarrange ses spectacles, repense les infrastructures, questionne l’isolement au fil d’une prochaine création : celle d’un dialogue entre un mât chinois et un accordéon. Créer pour panser les plaies, penser l’après.
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Page FacebookRédaction : Grégory Dubois – www.stepentreprendre.be