Comptoir des Ressources Créatives de Mons : un modèle participatif né de l’écoute du terrain
Dans le secteur en pleine expansion de l’économie sociale, le Comptoir des Ressources Créatives (CRC) de Mons se distingue par son approche unique et son impact significatif sur les créateurs locaux.
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Dans le secteur en pleine expansion de l’économie sociale, le Comptoir des Ressources Créatives (CRC) de Mons se distingue par son approche unique et son impact significatif sur les créateurs locaux. Soutenu par la Région wallonne, qui a contribué à sa pérennisation à travers des financements, le CRC permet aux artistes et entrepreneurs issus de métiers de la création de concrétiser leurs projets grâce à un accompagnement sur mesure et des services variés. Rencontre avec François Chevalier, coordinateur et acteur clé de cette aventure.
Un parcours ancré dans la création
François Chevalier n’est pas étranger au monde artistique. Dès l’âge de 14 ans, il a suivi des études dans ce domaine, ce qui l’a conduit à poursuivre sa passion à travers des études secondaires artistiques, un passage aux Beaux-Arts et un graduat en publicité. À 21 ans, il se lance comme indépendant, ouvrant une boutique d’art à Mons et organisant diverses expositions collectives. Après plusieurs années d’activités variées, François a rejoint la ville de Mons pour travailler sur le projet des « hubs créatifs ». Il a été le premier employé du service après la responsable, avec pour mission de mettre en place des actions concrètes sur le terrain.
Pendant trois ans, François a évolué au sein du pôle muséal de Mons, où il se concentrait sur le développement des « industries culturelles et créatives » (ICC), ainsi que sur l’accompagnement des start-up dans ce secteur. Cette expérience lui a permis de renforcer son réseau de contacts parmi les créateurs locaux et d’acquérir une connaissance approfondie des besoins spécifiques de la communauté artistique.
Malgré une carrière dynamique, François ressentait le besoin d’apporter plus de sens à son travail en s’engageant dans un projet à fort impact social.
Une opportunité inattendue
François a alors été approché pour participer à la création du Comptoir des Ressources Créatives (CRC) de Mons. Initialement sceptique quant à l’ajout d’un nouveau projet dans un écosystème déjà complexe, il a été convaincu après une visite au CRC de Liège. Là, il découvre un modèle qui lui parle : un projet véritablement social, porté par les créateurs eux-mêmes, loin des cadres institutionnels traditionnels. Ce fut le déclic pour François : il décide de quitter son poste à la ville pour devenir le premier employé du CRC de Mons.
Le CRC a démarré en 2017 en tant que projet pilote, financé par le ministre de l’Économie sociale. Pendant un an, François a travaillé seul depuis un bureau au sein de Smart Mons, avec pour mission de cartographier le secteur de la création à Mons. Il a passé l’année à sonder le territoire, en rencontrant les créateurs pour comprendre leurs besoins : « Qu’est-ce que tu fais, qu’est-ce qu’il te manque ? ». Ce travail impliquait beaucoup d’écoute et d’observation du terrain.
Après un an, et grâce à un nouveau financement de la Wallonie, François a pu engager Hélène Colmant pour renforcer l’équipe. C’est à ce moment-là que le CRC a commencé à s’agrandir, posant les bases de ses futures actions.
Le projet : un espace au service des créateurs
Le CRC de Mons se présente comme un espace de mutualisation des ressources, où les créateurs, qu’ils soient artistes, artisans ou entrepreneurs culturels, peuvent trouver le soutien dont ils ont besoin. Le CRC propose divers services, tels que l’accès à des espaces de travail, des équipements spécialisés, ou encore des conseils administratifs. L’accompagnement se fait à plusieurs niveaux : rencontres individuelles, ateliers collectifs, mise en relation avec des partenaires, et même aide à la réponse aux appels à projets.
Le CRC se distingue par son approche basée sur l’écoute et le diagnostic partagé. François Chevalier explique que chaque service développé répond à un besoin identifié sur le terrain : « Nous n’inventons pas des solutions, nous les co-créons avec les créateurs eux-mêmes ». Cette méthode permet de s’assurer que les actions entreprises ont un réel impact sur la communauté.
Les créateurs bénéficient d’infrastructures variées avec neuf bâtiments à Mons, mis à disposition par les pouvoirs publics locaux, où 70 créateurs ont actuellement un atelier. Ces espaces permettent non seulement de mutualiser du matériel, mais aussi d’accéder à des équipements partagés, comme une camionnette pour le transport de matériel. Les créateurs disposent également d’espaces de diffusion pour exposer et vendre leurs œuvres. Ces initiatives permettent de donner de la visibilité aux artistes tout en favorisant la réinsertion professionnelle. Par exemple, le CRC utilise le dispositif de l’article 60 pour remettre des personnes à l’emploi en les impliquant dans la gestion des espaces de diffusion et de la boutique des créateurs, offrant ainsi une opportunité de réintégration sur le marché du travail.
Les rencontres sectorielles, organisées régulièrement, constituent l’une des initiatives phares du CRC. Ces événements rassemblent les créateurs d’un même secteur pour discuter de leurs besoins spécifiques et des défis qu’ils rencontrent. C’est à travers ces échanges que des besoins communs émergent, ce qui permet de développer des solutions adaptées. Par exemple, les rencontres dans le domaine du cinéma ont fait ressortir une demande importante pour des compétences en régie. En réponse à cela, Technocité, un centre de formation local, a mis en place une formation spécialisée pour répondre à ces besoins identifiés, démontrant ainsi l’impact concret de l’approche du CRC.
Un soutien renforcé par la Wallonie
Le CRC de Mons ne serait pas ce qu’il est aujourd’hui sans le soutien de l’écosystème de l’économie sociale. En 2023, dans le cadre du Plan de relance de la Wallonie, le CRC a bénéficié d’une subvention pour pérenniser ses activités, grâce à une politique ambitieuse visant à promouvoir et diversifier les sociétés coopératives. Sur proposition de Christie Morreale, à cette époque vice-présidente et ministre de l’Économie sociale, la Région wallonne a accordé une bourse coopérative au CRC de Mons, faisant partie des 43 lauréats soutenus par le gouvernement.
Un impact tangible pour les créateurs et la communauté
Depuis 2017, le CRC a rencontré plus de 1 000 créateurs et a contribué à la réalisation de nombreux projets. Parmi eux, un artiste de breakdance a pu organiser un événement régional majeur grâce à l’accompagnement du CRC, qui l’a aidé à monter son dossier de subvention et l’a orienté vers les bons partenaires. Ce type de soutien permet aux créateurs de passer à un niveau supérieur en professionnalisant leurs pratiques, tout en créant des retombées économiques locales.
Pour François Chevalier, ce travail est une source de satisfaction immense. « Chaque projet lancé répond à un besoin concret. Nous ne faisons jamais quelque chose qui tombe dans le vide », souligne-t-il. En mettant l’accent sur les besoins réels des créateurs et en s’appuyant sur le soutien de l’écosystème wallon, le CRC montre qu’il est possible de développer des projets ayant un véritable impact social et économique.