Créée en 2012, la coopérative Terre-en-vue naît d’un constat de divers acteurs du RESAP (REseau de Soutien à l’Agriculture Paysanne) : celui que l’accès à la terre est un chaînon manquant dans la structuration d’un paysage alimentaire tendant vers la souveraineté et le développement d’un circuit court créant de la richesse locale. Un chiffre qui claque comme une fatalité.‘C’est pourtant une question cruciale, puisqu’elle intervient tout en amont de ce qui arrive dans notre assiette’ ajoute Perrine Ghilain, chargée de communication de la structure. Et un cas concret de venir alors amorcer le mouvement : un propriétaire terrien de Wavreille souhaite récupérer ses terres, ce qui met en péril l’agriculteur en place. Un terrain d’entente plus tard, c’est Terre-en-vue qui voit le jour pour soutenir au jour d’aujourd’hui 10 agriculteurs dans leur activité.
Terre-en-vue : Agriculteurs cherchent terre pour projets durables
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“En Belgique, ce sont 43 fermes qui disparaissent chaque semaine.“
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‘Nous avons jusqu’à présent plutôt permis de sauvegarder des fermes menacées de disparition, mais nous évoluons maintenant également vers de l’accompagnement à la transmission et de l’aide à l’installation’ poursuit Perrine. Baux précaires ou dépassés tels que le bail à ferme (qui protège trop l’agriculteur), valeur foncière et coûts d’exploitation, contraintes et vieillissement du métier, concentration de l’industrie agroalimentaire, inadéquation des aides européennes: autant de difficultés auxquels sont confrontés ceux qui voudraient se lancer dans le travail de la terre. ‘Il y a néanmoins un vent frais apporté par l’agro-écologie, que ce soit par de nouveaux arrivants dans le métier, ou des agriculteurs établis qui veulent sortir du conventionnel, se rendant compte que celui-ci n’est plus vivable pour eux’.
Agro-écologie et circuit court : les deux fondamentaux de Terre-en-Vue, qui possède à ce jour environ 60 hectares de terre et les met à disposition – pour un coût de 200€/ha/an – de qui rentre dans le modèle prôné et en développe une activité professionnelle. ‘Nous achetons des terres, sur base d’une demande et d’un projet, mais pouvons aussi simplement mettre en contact agriculteurs et propriétaires terriens. Cela a par exemple été le cas pour le Champ des Possibles, projet liégeois d’agriculture supportée par la communauté’. Dans le cas d’un achat, la coopérative émet un appel public à l’épargne, qui permet à toute personne intéressée de supporter la démarche à partir de 100 €. ‘Et cela dépasse la question purement financière car le soutien citoyen stimule vraiment le producteur et lui rend confiance dans son activité’. Et rompt également un isolement inhérent au métier.
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La recherche de la terre promise engagée, Terre-en-vue propose aussi à l’agriculteur un accompagnement sur les questions juridiques et agronomiques qui y sont liées. La structure tricéphale (coopérative, asbl, fondation) est enfin active dans le plaidoyer politique et fait partie de plusieurs réseaux belges et européens : ‘Un des grands enjeux transnationaux actuels est vraiment la question de la transmission des fermes, le risque étant que leur nombre chute toujours davantage pour laisser notamment place à une part plus grande de bâti. On parle ici de petites exploitations, et non de l’agro-industriel qui se porte bien mais nous propose tout sauf des produits sains et un modèle durable et responsable’. Dans notre plat pays, les questions de l’évolution du bail à ferme, de la création d’une banque foncière, et de l’accès aux propriétés publiques mobilisent également T-E-V.
Au-delà de tout ça, Terre-en-vue est surtout un livre rempli de belles histoires en train de s’écrire : ‘Nous sommes par exemple en train de chercher des terres près de Sampont (Arlon) et Buissonville (Rochefort), pour permettre à un producteur bovin et à deux jeunes maraîchers de pérenniser leur activité’. Ces belles histoires se racontent lors de la Fête de la Terre. ‘C’est un événement familial et festif, qui a pour objectif de réunir nos coopérateurs, de remercier notre centaine d’ambassadeurs bénévoles, mais aussi de faire connaître le mouvement du grand public’.
Informations : https://terre-en-vue.be
Rédaction: Gregory Dubois, Step Entreprendre