Design with sense : le sens du réemploi

C’est en 2014 que l’aventure démarre, lancée par Christelle Vial et Jacques Torrione, couple cherchant à joindre geste esthétique, impact positif sur l’environnement et préoccupation pour l’Humain. Leur parcours entrepreneurial entamé chez Job Yourself se poursuit au sein des coopératives d’emploi DiES, témoignant déjà de leur volonté de donner du sens à leur action. Le projet Design with sense est ensuite rapidement mis en réflexion chez CoopCity, l’incubateur bruxellois au service des projets d’économie sociale. S’y dessine sa gouvernance, ou comment passer avec succès d’une initiative portée par deux indépendants à une réelle entreprise partagée. « Nous sommes maintenant sept, une coopérative d’associés gérants où se côtoient les métiers de l’architecture d’intérieur, de production en atelier, et de la menuiserie dans une perspective totalement égalitaire, entre souveraineté du collectif et responsabilité individuelle. » expliquent Louise et Valérie.

Ancré pleinement dans l’économie circulaire, Design with sense lui a adjoint naturellement la coopération. « C’est une chose inhérente à ce type d’économie et d’artisanat, car ils mobilisent des compétences complémentaires et des chaînes de collaboration dans les différentes phases de conception d’un projet. » Chez Design with sense, on travaille en transversalité et dans une optique de conception inversée. « On part de la matière et on intègre très rapidement le futur utilisateur dans la réflexion, dans une approche de design thinking qui va faire émerger les besoins réels de celles et ceux qui vont occuper un lieu. On privilégie des allées et venues entre l’atelier de production, la menuiserie, les architectes et les clients afin de challenger au maximum les projets et d’impliquer directement toutes les parties prenantes dans la prise de décision. » Le marché de la coopérative est pour sa part autant celui du particulier (Bruxelles) que du professionnel (Belgique, selon l’ampleur), si toutefois celui-ci est prêt à jouer le jeu du co-design. On ne transige pas avec cette notion chez DWS.

C’est que celui-ci est une affaire sérieuse, une notion centrale et structurante, qui vise durabilité et impact. « Nous souhaitons que les environnements que nous concevons ne soient pas figés dans un moment mais puissent évoluer et anticiper des besoins futurs. Pour atteindre un objectif de réduction du bilan carbone, ils se doivent de durer dans le temps. C’est aussi pour cela que l’appropriation de la décision par les utilisateurs est si importante. Nous faisons avec ce qui est déjà là, la matière existante plutôt que du biosourcé à produire. Nous travaillons avec des bases d’aggloméré et de multiplex, du bois que nous récupérons sur des chantiers, ou en collaboration avec des entreprises de déconstruction telles que Rotor DC ou BatiTerre. Nous cherchons aussi les matériaux en fonction de la demande, avec un attrait pour l’ancien (les panneaux courbes, le formica). Notre promesse, notre signature, c’est une fabrication stylée avec plus de 80% de matériaux de récupération. » Et si une cuisine Design with sense – hors gamme de mobiliers et équipements reconditionnés – est certes un peu plus chère, c’est bien le prix  de la main d’oeuvre et du travail de conception adapté aux matériaux qui fait grimper l’addition, et pas celui d’une matière qui fait baisser fortement notre facture environnementale.

Développer la clientèle professionnelle… sans grandir
Après trois années d’activité en collectif, la coopérative a pour enjeu de toucher davantage de commerces et d’entreprises. ‘Notre défi est d’augmenter notre impact en travaillant sur de plus gros chantiers. De la sorte, nous estimons également pouvoir sensibiliser plus largement au réemploi, le rendre beaucoup plus visible et montrer qu’il peut être esthétique. Nous n’avons pas pour but que la coopérative grandisse pour assumer ces chantiers, mais bien qu’elle fasse écosystème et mobilise d’autres acteurs de l’économie sociale ou artisans. » Outre les entreprises citées supra, DWS collabore par exemple aussi avec La Ferme Nos Pilifs et l’atelier Bout2Bois de l’entreprise de travail adapté. « Nous avons voulu créer une coopérative, résultante de la somme de nos expériences de vie, et c’est une réussite. Nous réfléchissons désormais à l’ouvrir sur l’extérieur, et à permettre à notre communauté de l’intégrer. ». Et ainsi mobiliser de nouvelles ressources qui viendront elles aussi nourrir ce noble projet alliant l’utile à l’agréable.

Plus d’informations : designwithsense.be

Trois projets en quelques mots

* The Unusual Cafe : Aménagement d’un café/bar dans le centre de Bruxelles. L’identité de ce lieu est marqué par la présence d’anciennes portes bruxelloises (récupérées du démontage du bâtiment Oxy ou chinées chez Rotor DC et Batiterre), disséminées dans une structure en sapin (reconditionné par l’atelier Bout2Bois, à partir d’anciennes poutres de gymnase).

** La maison d’accueil : Il s’agit de l’aménagement de « La maison d’accueil », un hébergement pour les parents d’enfants hospitalisés à l’HUDERF (Hôpital universitaire des enfants Reine Fabiola). L’idée était de rendre l’espace plus convivial et chaleureux, tout en répondant aux besoins des familles. On a donc misé sur des matériaux résistants comme le trespa (réemploi) et le linoléum (à base de plastic recyclé), agrémenté de claustras en afzélia (rebuts de menuiserie) et panneaux courbes (anciens cache-radiateurs).

*** Silhouet : Aménagement des bureaux de Silhouet Architects. Nous avons démonté et retravaillé d’anciennes étagères industrielles métalliques (de chez Rotor DC) pour créer une partie du mobilier (bacs à plante, étagères faisant office de séparation entre le coffee corner et l’espace de travail, meubles de rangement). Les bardages et différentes faces de cuisine sont composés à partir de chutes de nos anciens projets, ce qui donne un rendu éclectique mêlant linoléum (à base de plastic recyclé) et différents plaquages bois (rebuts de menuiserie).