La missive tombait dans les boîtes mail ce début janvier : Hugues Dorzée quitte donc Imagine, près de douze ans après avoir pris le relais d’André Ruwet à la tête de ce média vieux de bientôt trente ans, précurseur d’une slow press qui entend donner un regard constructif et apaisé sur le monde, une sentinelle critique dont les valeurs étaient réaffirmées en 2020 dans un manifeste fort. Ses mots sont à l’image de la personne, posés et doux. Son attention est quant à elle portée sur le média, un bébé qu’il laisse entre de bonnes mains. ‘C’est évidemment une décision difficile à prendre, mais qui a été bien réfléchie et qui a été accueillie avec l’extrême bienveillance d’une équipe formidable. Ces onze années ont été intenses, marquées par la transmission, le développement du média, la réflexion collective à 360° autour du modèle économique, de la gouvernance, du projet éditorial… qui ont débouché, en 2023, sur la création d’Imagine COOP. Nous faisons un métier passionnant mais qui, à la longue, est aussi très éprouvant dans un contexte tendu pour la presse indépendante.’
Une profession aux premières loges d’un monde aux abois, dans lequel Imagine assume des fonctions de décryptage, d’inspiration, d’observation des ‘mutations en cours et à venir’, avec optimisme. ‘Imagine se range du côté de la poésie et de la beauté du monde (…) C’est un magazine où l’on apprend, découvre, vit et vibre avec gaieté, créativité et fraternité.’ peut-on encore lire sur son site. ‘Derrière ces élans d’enthousiasme bien réels se logent également des peines. Traiter en permanence les inégalités sociales et les dégâts de l’écosystème peut à terme user et alimenter une forme d’éco-anxiété. C’est un type de journalisme responsabilisant et humaniste qui demande d’adopter constamment un prisme constructif, tout en étant confronté à l’abrupte réalité des choses. Celle du monde, mais celle aussi de la réalité entrepreneuriale des chiffres et d’un modèle économique fragile. Un journalisme de qualité comme nous le concevons requiert du temps, de l’intelligence collective, des moyens financiers. C’est un cycle qui se termine pour moi, mais nul n’est irremplaçable et l’équipe est remplie de ressources et de talents. Imagine va continuer à se déployer autrement.’