L’occupation temporaire : kézako ?
S’il y a belle lurette que des bâtiments vides sont « squattés », l’occupation temporaire n’existe dans nos contrées que depuis une bonne quinzaine d’années. Bien qu’il n’existe pas de législation qui lui soit spécifiquement dédiée, sa pratique repose sur un outil juridique, la « convention d’occupation précaire et temporaire ». Contrairement au squat, où il n’y a aucun contrat entre l’occupant et le propriétaire des lieux, cette convention est établie d’un commun accord entre les deux parties et encadre un minimum les conditions d’occupation. Pour éviter d’être requalifié comme bail d’habitation, le contrat ne doit pas mentionner de « locataire » ni de « loyer », mais bien un « occupant » et une « indemnité », qui doit rester significativement en deçà du prix du marché.
La convention jouit d’une jurisprudence, mais l’évaluation de la nature d’un contrat reste à l’appréciation des instances juridiques, ce qui lui confère une certaine insécurité. A cela s’ajoute un cadre peu normé, où il subsiste un certain flou autour de questions portant sur la salubrité des lieux, la protection contre l’incendie ou encore l’encadrement d’une activité commerciale. En d’autres termes, si l’occupation temporaire marque un progrès par rapport au squat, elle n’en demeure pas moins une pratique aux contours trop peu réglementés. Pour le propriétaire, c’est un moyen d’éviter des coûts d’inactivité potentiellement élevés, de la détérioration naturelle du lieu à une possible amende pour inoccupation du bien pendant plus d’un an. Pour l’occupant, c’est l’assurance d’avoir un toit ou de pouvoir exercer son activité à un coût raisonnable.
Quand on sait que le marché de l’immobilier favorise les entreprises privées au détriment des initiatives non lucratives et des publics défavorisés, on comprend tout l’enjeu et la nécessité de soutenir cette pratique. Une situation d’autant plus d’actualité depuis l’introduction de la loi anti-squat en 2017.
L’expérimentation comme fil conducteur
Que ce soient des logements d’urgence, de l’habitat groupé, des projets d’économie sociale ou des activités socioculturelles, sportives ou artistiques, les initiatives qui donnent vie à une occupation temporaire répondent toutes à l’objectif de tendre vers une société plus harmonieuse à travers l’expérimentation et l’innovation, en tissant du lien entre les citoyens et leur environnement urbain. Autrement dit, l’occupation temporaire, c’est en quelque sorte un laboratoire permanent, où chaque projet peut exprimer sa créativité, dans l’intérêt du bien commun.