Repenser la mobilité
L’histoire de Shifti débute en 2021, lors d’une université d’été pour le climat. Les participants sont invités à imaginer un projet capable d’éviter 10.000 tonnes de CO2 par an. Fort de son expérience dans le domaine de la mobilité, Michaël Horevoets se penche avec son équipe sur la piste des vélis, les véhicules électriques légers intermédiaires. « On s’est vite rendu compte qu’il n’y avait rien sur le marché, ni en Belgique, ni en Europe, ni même dans le monde. Alors on s’est dit : qu’à cela ne tienne, fabriquons notre propre véhicule ! », raconte-t-il.
Autour de lui, une équipe pluridisciplinaire – ingénieurs, designers, chercheurs, acteurs associatifs – imagine un véhicule qui soit à la fois pratique et cohérent avec les valeurs de l’économie sociale. « Pour nous, c’était important que ce soit fabriqué dans l’économie sociale. Ça nous permet d’avoir la main sur qui fabrique, dans quelles conditions, avec quels salaires, et d’intégrer de l’économie circulaire. »
Dès le départ, le projet s’ancre dans une vision plus large : repenser la place de la voiture dans nos vies. «L’objectif porté depuis 2022 par notre ASBL Shift Modal est de mettre fin à la suprématie de la voiture. Une voiture pèse en moyenne 1250 Kg, coûte en moyenne 6.000 € par an et n’est utilisée que 5 % du temps. Est-ce qu’on a vraiment besoin de ça pour aller chercher du pain ou déposer les enfants à l’école ? On doit redonner de la place aux modes actifs et aux véhicules intermédiaires, qui répondent aux mêmes besoins, mais de manière bien plus efficace » explique Michaël.
L’alternative qui change l’échelle
Le Shifti n’est ni un vélo cargo, ni une voiture électrique miniature, mais un véhicule à assistance électrique capable de transporter jusqu’à 250 kg de charge utile. Sa banquette arrière peut accueillir deux passagers, son coffre se ferme à clé, et une carrosserie légère protège ses occupants des intempéries. Vitesse maximale : 25 km/h, avec l’ambition d’atteindre un jour 45 km/h si la réglementation européenne évolue.
« On a pensé le véhicule pour répondre aux besoins des gens qui ne font pas de vélo, que ce soit en raison de la distance, des conditions météo, du transport des enfants ou des courses… Notre objectif, ce n’est pas de mettre les cyclistes sur un vélo couvert, mais des automobilistes dans quelque chose de beaucoup plus léger que la voiture. », explique Michaël.
Avec sa consommation infime – moins de 5 kWh pour 100 km, contre 60 pour une citadine thermique – Shifti veut prouver qu’il est possible de se déplacer autrement. Le projet s’inscrit dans une logique de complémentarité avec les transports en commun. « Nos véhicules ne remplacent pas le train ou le bus, ils les complètent. Les transports publics assurent les grands trajets, et nos vélis prennent le relais pour les premiers ou derniers kilomètres, directement depuis la place du village ou la gare. » Un seul véhicule partagé pourrait remplacer jusqu’à neuf voitures individuelles selon l’étude de WayToGo.