Un tremplin sécurisé vers l’indépendance
Les SAACE proposent un accompagnement sur mesure aux demandeurs d’emploi qui souhaitent se lancer comme indépendants. Leur modèle, ancré dans l’économie sociale, vise à rendre l’entrepreneuriat accessible à toutes et tous, y compris aux personnes n’ayant pas de formation ou de culture entrepreneuriale préalable.
Le cœur du dispositif repose sur la possibilité de tester son activité en couveuse : pendant 12 à 24 mois, les porteurs de projet utilisent le numéro de TVA de la structure, peuvent conserver leurs allocations et bénéficient d’un accompagnement comptable, juridique et commercial. Cela leur permet de valider leur projet dans un cadre sécurisé, sans risque immédiat sur leur situation personnelle ou financière. « S’ils se rendent compte que ça ne fonctionne pas, ils ont eu un droit à l’erreur et à beaucoup d’apprentissages. Ils repartent avec de nouvelles compétences et une meilleure compréhension de ce que signifie entreprendre » – Delphine Stevens, directrice de Step Entreprendre.
Vers une mutualisation
Les chiffres les plus récents montrent que ce modèle porte ses fruits : le taux de pérennité à 3 ans des activités créées est actuellement de 85%. En 2024, près de 500 entreprises ont été créées et 175 demandeurs d’emploi réorientés vers un travail salarié de qualité. Au-delà de la remise à l’emploi, la contribution pour la collectivité est réelle. 1€ investi dans une SAACE permet de récupérer 1,84€ dès la première année, et les entrepreneurs en test ont généré 7,46M€ de chiffre d’affaires en 2024, soit 1,34M€ de TVA et 570 000€ d’impôts.
Aujourd’hui, 11 SAACE sont actives sur le territoires wallon (Alpi, Avomarc, Azimut, Challenge, CréaJob, Crédal, JeCréeMonJob, Job’In, Sace, Start Construction et Step Entreprendre), mais cette configuration est appelée à disparaître. Une réforme de grande ampleur, portée par le Ministre de tutelle et Wallonie entreprendre, vise à rationaliser le dispositif en réduisant le nombre de structures et en redéfinissant les territoires d’action. L’objectif politique affiché est d’améliorer la lisibilité de l’offre pour les demandeurs d’emploi. Dès janvier 2026, toutes les SAACE devront se regrouper sous une bannière unique « Starter Wallonia » et adopter un fonctionnement harmonisé.
Pour y répondre, les SAACE ont été invitées à proposer elles-mêmes un nouveau modèle, une « auto-réforme », guidée par des balises ministérielles. Le secteur s’est mis en mouvement, misant sur la complémentarité et le respect des expertises, tout en limitant autant que possible le coût social lié à cette rationalisation. « C’est un bouleversement profond pour nos structures, mais le secteur s’est mis en ordre de marche. L’idée est de prendre le meilleur de chacun, de réunir les expertises et de construire quelque chose de mieux, ensemble » affirme Delphine Stevens.
Réforme du secteur, réforme du chômage: enjeux croisés
En parallèle, une autre réforme fait fortement parler d’elle et se prépare elle aussi pour début 2026 : la réforme du chômage. La limitation de la durée des allocations à 24 mois aura indéniablement un impact pour les publics accompagnés par les SAACE et le secteur redoute un effet de volume similaire à celui observé en 2014, lors de la précédente réforme. Un grand nombre de chercheurs d’emploi avaient introduit des demandes d’accompagnement, parfois simplement en dernier recours. « Ce n’est pas une bonne raison de se lancer comme indépendant », rappelle Delphine Stevens. « Cela risque de contraindre les SAACE à opérer un tri plus rigoureux parmi les candidats ».
Un autre point d’inquiétude est concernant les personnes accompagnées sous statut CPAS. « C’est plus complexe car les CPAS ne connaissent pas toujours bien notre fonctionnement. Il y a encore tout un travail à faire pour qu’ils comprennent que l’activité hébergée en couveuse ne constitue pas un revenu complémentaire pour l’allocataire, c’est avant tout un accompagnement sécurisé », précise-t-elle.