Vous avez certainement déjà entendu parler de l’affaire Publifin. Fin 2016, suite aux révélations du magazine Le Vif/L’Express, sont rendues publiques les rémunérations démesurées perçues par plusieurs mandataires politiques locaux dans le cadre de réunions superflues censées guider le conseil d’administration dans le pilotage de l’intercommunale. On apprend, entre autres, que certains mandataires ont gagné jusqu’à 500 € la minute, ce qui offusque profondément l’opinion publique. Les scandales s’enchaînent au fil des mois, ce qui pousse les pouvoirs publics à repenser leur système de gestion des intercommunales.
Pour rappel, une intercommunale est un holding constitué de différentes instances publiques, autrement dit un bras financier étatique, qui pilote une ou plusieurs filiales. Dans le cas présent, il s’agit de Nethys, une société anonyme active dans les secteurs de l’énergie, des télécommunications et du développement industriel. La société détient notamment l’opérateur Télécom VOO, mais aussi BeTV et les Editions de l’Avenir. Ce qui nous amène à notre sujet du jour.
Des années d’inaction managériale et un plan de restructuration démoralisateur
Nous l’avons dit, l’affaire Publifin remet profondément en question la gestion des intercommunales. De fait, l’état a émis la volonté de se retirer, du moins partiellement, du capital de Nethys, laissant présager une vente des parts des Editions de l’Avenir. En parallèle, la gestion interne du groupe Nethys a longtemps plongé le personnel de l’Avenir dans une profonde morosité. Racheté en 2013, le quotidien est depuis constamment mis sous pression. Le conseil d’administration de Nethys ne croit pas en la pérennité de son modèle économique, et les nombreuses suggestions du personnel se confrontent à un mur. Au niveau décisionnel, rien ne bouge. La frustration gagne la rédaction, qui se sent impuissante. Le 23 octobre 2018, un plan de restructuration massif est annoncé : 60 équivalents temps-plein sont évincés. C’est la goutte d’eau qui faire déborder le vase. Dans un état des lieux publié un an jour pour jour après la décision, le personnel décrit son ras-le-bol général, qui s’étend de la frustration d’un management inexistant à la douleur des départs, sans oublier la fatigue chronique qui consomme ceux qui restent.
Une coopérative pour reprendre son destin en main
L’idée de coopérative émerge lors d’une réunion de rédaction. Pourquoi ne pas reprendre son destin en main et mobiliser lecteurs, investisseurs et rédacteurs dans la création d’une coopérative qui prendrait part dans le capital du journal en cas d’ouverture de son actionnariat ? Cela permettrait au personnel d’avoir son mot à dire dans les orientations stratégiques de son journal, de même que renforcer l’esprit communautaire avec les lecteurs. Une petite équipe exécutive se met en place et la coopérative voit le jour le 25 octobre dernier, après avoir bénéficié de l’accompagnement de l’agence conseil Propage-s. Une centaine de membres de la rédaction s’est déjà engagée à alimenter le capital de la coopérative et un large appel à l’épargne devrait être lancé dans les semaines à venir. L’objectif est de réunir une somme suffisante pour acquérir entre 10 et 20 % des parts de l’entreprise, de quoi négocier une convention d’actionnaires et assurer une présence dans le conseil d’administration des Éditions de l’Avenir. Le meilleur moyen pour les membres du journal de préserver tant leur indépendance rédactionnelle que l’ancrage local du journal au niveau wallon. Surtout, la volonté est de retrouver une paix sociale au sein de l’entreprise.